Démarches en ligne des entreprises en Afrique: où en est-on?

Peut-on effectuer les démarches en ligne pour son entreprise en Afrique ? C’est sans doute une question que se posent de nombreux entrepreneurs de la zone OHADA. Pour rappel, l’OHADA, c’est l’Organisation pour l’Harmonisation du Droit des Affaires, qui comprend 17 Etats membres, principalement d’Afrique dite francophone (Bénin, Burkina-Faso, Cameroun, Comores, Congo, Côte d’Ivoire, Gabon, Guinée, Guinée Bissau, Guinée Equatoriale, Mali, Niger, Sénégal, Tchad, Togo, RCA, RDC).

Qu’entend-t-on par démarches en ligne ? 

Par formalités des entreprises, on entend les procédures administratives de création de société, de modification de société en cours de vie sociale (changement de dirigeants, de siège social, augmentation ou diminution du capital social) ou encore le dépôt annuel des comptes

Quelle est l’organisation actuelle ? 

Dans les pays de la zone OHADA, ces formalités se font auprès du Registre du Commerce, qui est organisé de la manière suivante :

  • le Registre du Commerce et du Crédit Mobilier (RCCM) qui est tenu par le greffe des juridictions compétentes dans chaque Etat ;
  • le Fichier National qui centralise les renseignements consignés dans chaque RCCM ;
  • le Fichier Régional, tenu auprès de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage, qui centralise les informations contenues dans chaque Fichier National.

En pratique, c’est le greffe du tribunal de commerce de chaque pays ou ville qui tient le RCCM. Les démarches se font principalement sur place, à l’aide de formulaires, qui sont complétés, signés et remis au greffier accompagnés des documents justificatifs. Ainsi, les formalités n’étant pas digitalisées ou l’étant seulement partiellement, elles peuvent se révéler consommatrices de temps et d’énergie.

Pourquoi la digitalisation des formalités est-elle cruciale ?

La possibilité d’effectuer ces démarches en ligne faciliterait grandement la vie des acteurs économiques :

  • Gain de temps :  non seulement pour les usagers, qui n’auraient pas à se déplacer au tribunal de commerce pour effectuer leur formalités, mais aussi pour l’administration, qui pourrait collecter et mettre à disposition les données d’entreprises beaucoup plus facilement ;
  • Economie de papier puisque les usagers pourraient remplir leurs formulaires directement en ligne et fournir les documents justificatifs par le même biais ; et en conséquence limitation des problématiques de stockage de papier, puisque qu’on sait que lorsque les formalités se font sur papier, les piles s’accumulent très rapidement ;
  • Accessibilité à tous grâce aux démarches à distance, qui n’impliquent pas nécessairement d’être dans le pays du siège de l’entreprise. Les entrepreneurs, qui sont de plus en plus mobiles dans le contexte actuel mondialisé, pourraient se passer d’un relais local pour effectuer leur formalités ; en outre, le secteur informel pourrait plus facilement passer au secteur formel si les démarches étaient simplifiées.

Quels sont les progrès actuels et perspectives d’évolution ? 

Dès son édiction en 2011, l’Acte uniforme OHADA révisé portant sur le droit commercial général prévoyait l’informatisation du RCCM, du fichier national et du fichier régional, et le Livre 5 est entièrement consacré à cette question. Ce livre prévoit expressément que les trois fichiers peuvent être tenus sous forme électronique, et consacre à cette effet la validité des documents et des signatures électroniques. 

Par ailleurs, depuis 2017 sont reportées dans la presse des initiatives d’informatisation du registre. Ainsi, un projet de digitalisation du RCCM, financé par la Banque Mondiale a été déployé à partir de 2017. L’objectif affiché était de permettre aux entreprises d’obtenir en moins de 24 heures tous les actes nécessaires. Dans ce cadre, le Secrétariat permanent de l’OHADA à Libreville a organisé du 5 au 16 novembre 2018 deux formations sur la maîtrise de la solution informatique déployée par cette organisation. Cette solution a été progressivement déployée dans d’autres pays de l’OHADA. 

Cependant, ce logiciel semble pour l’instant limité à un usage interne à l’administration, car il n’existe pas à ce jour de portail en ligne du RCCM permettant aux entreprises d’effectuer leurs formalités directement en ligne. Ces initiatives proviennent plutôt d’agences de promotion de l’investissement, par exemple l’ANPI au Gabon qui permet, grâce au Guichet Numérique d’Investissement (GNI) de créer et gérer une société en ligne. En République Démocratique du Congo, le Guichet Unique de Création d’Entreprise (GUCE) est un centre unique d’accomplissement rapide des formalités de création d’entreprises. Il regroupe en son sein tous les services intervenant dans le processus de création d’une entreprise, notamment l’office notarial, le greffe d’immatriculation au RCCM ainsi que l’administration des impôts, avec des objectifs affichés de célérité, transparence, efficacité et facilitation. Pour l’heure, même si elles sont centralisées, les démarches ne sont pas encore entièrement informatisées.

En revanche, si on sort de l’Afrique dite francophone, on trouve des pays plus avancés, à l’instar du Ghana où le « Registrar General’s Department » permet aux entreprises d’effectuer l’intégralité de leurs démarches en ligne, de la constitution à la radiation, en passant par les modifications en cours de vie sociale.

Quelles conditions pour des formalités entièrement informatisées ? 

Cinq préalables seraient nécessaires à la mise en place d’un service en ligne : 

  • informatisation des formulaires destinés au public ;
  • un système de transmission sécurisée des documents officiels et la possibilité de vérifier leur authenticité en ligne ;
  • un système de paiement sécurisé basé sur les habitudes locales (par exemple la monnaie électronique) ;
  • un système sécurisé de signature électronique, répondant aux exigences législatives en la matière lorsqu’elles existent ;
  • une interconnexion entre les différentes administrations (RCCM, impôts…) pour plus de fluidité.

Compte tenu du dynamisme entrepreneurial qui touche actuellement l’Afrique, la digitalisation des formalités est une évolution naturelle du monde des entreprises qui est déjà en marche. 


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

logo Mandémory
Mandémory, cabinet d’avocat engagé dans l’essor des économies africaines et dédié à l’accompagnement de ses acteurs.

Le cabinet

© MANDEMORY 2025. Tous Droits Réservés

Nous utilisons des cookies pour personnaliser le contenu, fournir des fonctions de médias sociaux et pour analyser notre trafic. Nous partageons également des informations sur votre utilisation de notre site avec nos partenaires de médias sociaux, de publicité et d'analyse. View more
Accepter
Refuser